Le mythe dans « La Modification » de Michel Butor

Publié le par chichiwac

Le mythe dans « La Modification » de Michel Butor

1-« La Modification » un Récit mythique :

     Nombreuses sont les études qui ont classé le roman de la Modification  de Michel Butor comme récit mythique et le traitent selon la méthode structurale de Claude Levi-Strauss pour l’analyse des mythes.

Levi-Strauss voit dans le mythe un acte de parole dans lequel on peut découvrir un langage. Influencé par Hegel, Levi-Strauss pense que l’esprit humain organise fondamentalement sa pensée sous la forme : thèse – antithèse - synthèse. Ce mécanisme permettant de rendre la signification possible. Bref, Levi-Strauss considère que le mythe est un stratagème habile qui transforme une opposition binaire inconciliable, en une opposition binaire conciliable, créant ainsi l’illusion ou la croyance qu’elle a été résolue.

Dans la Modification de Michel Butor, comme interprétation probable de l’application de la théorie donne que : Léon Delmon, recourt au mythe pour transformer l’opposition Henriette/Cécile  de sa forme inconciliable à une forme compatible à sa situation théologique, sociale et même économique.    

2-L’introduction du mythe : la rencontre de Sibylle et la descente au Enfers :  

     Le rêve, dans la Modification, rassemble et nomme les principaux mythes mis en œuvre dans le récit ; désormais La descente aux Enfers est le plus évident.

    La Sibylle, dans la modification grecque, est une prêtresse d’Apollon qui personnalise la divination et prophétise. Dans la modification elle dialogue avec Léon dans son début de sommeil : troisième partie ; chapitre VII page 214-215 : « Fatigants ces bois, fatigante cette savane, ces pierres, mais maintenant tu as droit de te reposer… »

« Pourquoi ne me parles-tu pas ? T’imagines-tu que je ne sais pas que toi aussi tu vas à la recherche de ton père … »

«Non,  ce n’est pas la peine de rire de moi, je ne veux rien, Sibylle, je ne veux que sortir de là … »

C’est le début du cauchemar de Delmon. La descente  aux Enfers d’Enée , le fondateur mythique d’un royaume à l’origine de Rome et de son Empire qui figure fort bien dans tout l’œuvre à travers les visites que le personnage a effectué au près de ses musés, ses ruines : Arc de Constantin, Farnèse. De plus ses citations des dieux, empereurs, artistes de Rome  exemple : Mars,  Janus, Julien Lapostat, Messaline, Michel-Ange, Panini.

      Enée métamorphosé en Léon est accompagné de la Sibylle de Cumes, elle lui avait montré où cueillir le Rameau d’or, dans les bois sur les bords du lac d’Averne, rame qui devait lui permettre de pénétrer dans le royaume d’Hadès : le maître des Enfers.

Ce dernier fera son apparition juste après, troisième partie, chapitre VII  (page 220) : « Alors vient sur le fleuve boueux …. » 

Troisième partie ; chapitre VII ; page 220 : « il est arriver au bord de l’eau … »

     Michel Butor applique la méthode du découpage du mythe en mythèmes. Puis il insiste sur les mythèmes qui seront sujet de la transformation du protagoniste mythologique en un protagoniste créateur de sa propre décision. Notamment la descente au Enfer de Léon Delmon, pendant son rêve cauchemar, dans La Modification, est un mythème du mythe d’Orphée et Eurydice, pour recomposer celui de Léon et Cécile c’est à dire: Léon va chercher celle qui aime à Rome , qui n’est  sans doute pas les Enfers ; mais qu’il finit par la  perdre après l’avoir convaincu de le suivre à Paris, l’équivalent de la vie mondaine, peut être parce qu’il n’a pas su aller de l’avant sans se retourner sur son passé. De même Orphée a perdu Eurydice lorsqu’elle le suivait pendant leur retour des Enfers ; il n’a pas pu se retenir de ne pas regarder derrière lui, comme l’avait conditionner la reine des Enfer pour lui rendre sa bien aimer.    

  

3-Le mythe une représentation d’un débat antérieur :

 

      Selon Freud les rêves sont des représentations de désirs refoulés dans l’inconscient par la censure du surmoi. Le mythe, ici, est donc une thérapie. Si on revient à ce que levi-Strauss a nommé : un stratagème habile de conciliation.

Léon Delmont vit un débat antérieur entre la censure du surmoi qui favorise Henriette et contredit le ça, qui n’est que son désir refoulé à l’image de Cécile : sa libération de tout attachement. Le mythe intervient pour concilier l’inconciliable ; ce qui aboutira à la fin à une prise de conscience du moi.

Léon Delmont, rencontre Sibylle,  descend aux Enfers, il meurt dans son rêve/cauchemar ; mais il revit pour  prendre conscience. Il modifie son projet. il superpose un nouveau rêve : le roi du Jugement ; s’auto accuse puis se réveille à la troisième partie, à la fin du VIII chapitre, page 272:  « vous ne dormez plus maintenant. Il faut vous lever… ».     

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